La motivation enrichie en droit des contrats

L’ouvrage collectif La motivation enrichie des arrêts rendus par la Cour de cassation, dirigé par Marie Dugué et Julie Traullé, vient de paraître chez LexisNexis. Il rassemble autour de deux axes (approche comparative et approche thématique) les contributions rédigées à la suite d’un séminaire de recherche organisé par l’IRJI François-Rabelais de l’université de Tours.

J’ai eu le plaisir de contribuer à cet ouvrage sur le thème « La motivation enrichie en droit des contrats : une transparence en trompe-l’oeil, une pédagogie à parfaire » (p. 83 et s.).

Résumé de l’ouvrage :

Depuis quelques années maintenant, les arrêts de la Cour de cassation dotés d’une importance particulière sont régulièrement assortis d’une motivation dite enrichie. Un premier regard peut d’ores et déjà être porté sur cette évolution. Dans cette perspective, une approche pluridisciplinaire présente le mérite d’appréhender la motivation enrichie sous ses différents aspects. Une étude de la pratique d’une chambre, comme la Chambre sociale ou la Chambre criminelle, peut être utilement complétée par une approche par type de contentieux, comme le droit du cautionnement, impliquant plusieurs chambres.

Au-delà, l’usage de la motivation enrichie, aussi appelée motivation en la forme développée, invite à sinterroger sur les contours de ce changement dans la rédaction des arrêts rendus par la Cour de cassation. Quand faut-il avoir recours à la motivation enrichie ? Que faut-il dévoiler dans ce cadre ? Plus généralement, que faut-il attendre de la motivation d’une décision de justice ?

Le lecteur trouvera des éléments de réponse non seulement dans les réflexions pluridisciplinaires proposées au sein de l’ouvrage, mais également dans l’approche comparative proposée en premier lieu.

Contributeurs : Gwenola Bargain, Bérénice Bauduin, Francois Brunet, Nicolas Cayrol, Marie Dugué, Clément François, Paul Catardo, Hélène Gourdy, Jerêmy Houssier, Franck Juredieu, Colombine Madelaine, Pierre-Yves Monjal, Sophie Prétot, Olivia Robin-Sabard, Delphine Thomas-Taillandier et Julie Traullé.

Parution du « Cours de droit des obligations 2023 »

La cinquième édition du Cours de droit des obligations, que j’ai rédigée avec Garance Cattalano, vient de paraître aux Éditions IEJ de la Sorbonne.

Ce manuel s’adresse spécifiquement aux étudiants qui préparent l’examen d’entrée au CRFPA. La matière y est enseignée dans l’optique de la réalisation d’un cas pratique. Le manuel présente ainsi le droit positif de manière synthétique, ce qui permet de balayer un programme très vaste (droit des contrats, responsabilité civile, régime général de l’obligation et droit de la preuve) dans un format relativement contenu, 753 pages. Les débats doctrinaux et les données historiques, qu’il est rarement nécessaire de mobiliser dans le cadre de l’épreuve de droit des obligations de l’examen d’entrée au CRFPA, ne sont évoqués que ponctuellement lorsque cela apparaît indispensable, par exemple lorsque l’interprétation d’une disposition légale ou d’un arrêt est discutée.

Le manuel est agrémenté de nombreux schémas et tableaux pour faciliter la compréhension et le travail de révision.

Photo cours de droit des obligations 2023

L’ouvrage est disponible dès maintenant dans la librairie en ligne de l’université et chez les librairies partenaires, comme les librairies LGDJ et Dalloz. Les étudiants qui s’inscrivent à la préparation CRFPA estivale de l’IEJ de Paris 1 recevront par ailleurs un exemplaire de ce manuel, inclus dans leurs frais d’inscription.

Ce manuel s’inscrit dans la collection « CRFPA » des Éditions IEJ de la Sorbonne que j’ai eu le plaisir de diriger cette année encore. Les onze ouvrages de cette collection sont désormais disponibles dans leur cinquième édition :

  • Cours de droit des obligations 2023, 5e éd., C. François et G. Cattalano, 753 pages, ISBN 978-2-38041-042-6
  • Cours de droit administratif 2023, 5e éd., P. Brunet, I. Lamouri, D. Soldini et F. Duffaud, 525 pages, ISBN 978-2-38041-043-3
  • Cours de droit civil 2023, 5e éd., J. Houssier, J. Laurent, F. Masson, M. Saulier et F. Viney, 691 pages, ISBN 978-2-38041-044-0
  • Cours de droit des affaires 2023, 5e éd., R. Dalmau, M. Houssin, F.-X. Lucas et P. Rubellin, 673 pages, ISBN 978-2-38041-045-7
  • Cours de droit fiscal 2023, 3e éd, G. Loustalet et A. Merchadier, 559 pages, ISBN 978-2-38041-052-5
  • Cours de droit international et européen 2023, 5e éd., É. Farnoux, C. Prieto, L. Rass-Masson et S. Robin-Olivier, 513 pages, ISBN 978-2-38041-046-4
  • Cours de droit pénal 2023, 5e éd., N. Jeanne et É. Letouzey, 661 pages, ISBN 978-2-38041-047-1
  • Cours de droit social 2023, 5e éd., A. Fabre, F. Rosa et J. Icard, 829 pages, ISBN 978-2-38041-048-8
  • Cours de procédure administrative contentieuse 2023, 5e éd., P.-O. Caille, 323 pages, ISBN 978-2-38041-049-5
  • Cours de procédure civile et de voies d’exécution 2023, 5e éd., L. Veyre, H. Michelin-Brachet, M. Guez et O. Robin-Sabard, 561 pages, ISBN 978-2-38041-050-1
  • Cours de procédure pénale 2023, 5e éd., N. Jeanne et É. Letouzey, 425 pages, ISBN 978-2-38041-051-8

Utiles précisions de la chambre commerciale quant au revirement abandonnant pour le passé la jurisprudence Consorts Cruz

Note sous Cass. com., 15 mars 2023, pourvoi n° 21-20.399 :

Par un arrêt du 15 mars 2023, la chambre commerciale manifeste son adhésion au revirement effectué deux ans plus tôt par la troisième chambre civile (Cass. 3e civ., 23 juin 2021, n° 20-17.554 ; 20 oct. 2021, n° 20-18.514 ; V. mes obs. sous le premier de ces arrêts) : pour les promesses unilatérales de vente conclues avant le 1er octobre 2016, la révocation de la promesse par le promettant avant l’expiration du temps laissé au bénéficiaire pour opter n’empêche plus la formation du contrat promis. Ce faisant, la Cour de cassation aligne la jurisprudence applicable aux promesses unilatérales de vente conclues avant le 1er octobre 2016 sur la nouvelle solution consacrée par l’ordonnance du 10 février 2016 à l’article 1124, alinéa 2, du Code civil. A travers une motivation enrichie, la chambre commerciale érige expressément l’ordonnance de 2016 en source d’inspiration de ce revirement pour le passé, contrairement à la troisième chambre civile qui n’avait fait aucune référence expresse à cette réforme dans ses deux arrêts rendus en 2021. La Cour de cassation s’oppose ainsi ouvertement à la volonté exprimée par certains parlementaires, à l’occasion du vote de la loi de ratification du 20 avril 2018, que les hauts magistrats cessent de modifier la jurisprudence applicable aux contrats conclus avant le 1er octobre 2016 pour l’aligner sur les nouvelles dispositions de l’ordonnance, contribuant ainsi à déjouer indirectement la disposition transitoire de l’article 9 de l’ordonnance.

L’arrêt rendu par la chambre commerciale se démarque également de ceux de la troisième chambre civile en ce qu’ils tranchent la question de la conventionnalité de la rétroactivité du revirement jurisprudentiel opéré sur cette question. La chambre commerciale accepte de contrôler que l’application rétroactive du revirement au cas d’espèce ne porte pas une atteinte disproportionnée au principe de sécurité juridique, au droit à un procès équitable et au droit au respect des biens. Cet arrêt s’inscrit ainsi dans la continuité de la jurisprudence récente de la Cour de cassation qui admet progressivement de nouvelles hypothèses de modulation dans le temps de la jurisprudence alors que la seule dérogation admise antérieurement à la rétroactivité était l’hypothèse de la violation du droit à l’accès au juge de l’une des parties au litige (art. 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l’homme ; V. par ex. Cass. 2e civ., 18 avril 2019, n° 17-21.189). La chambre commerciale conclut néanmoins à l’absence de violation d’un droit fondamental en l’espèce, à l’issue d’une application peu convaincante, sur la forme, du contrôle de proportionnalité.

Note Gazette du Palais 2023

Mon commentaire intégral de cet arrêt peut être consulté à la Gazette du Palais (« Utiles précisions de la chambre commerciale quant au revirement abandonnant pour le passé la jurisprudence Consorts Cruz », note sous Cass. com., 15 mars 2023, Gaz. Pal. 9 mai 2023, n° 15, p. 18, GPL448n0).

Licéité et effets de la révocation conventionnelle d’une donation en présence d’héritiers réservataires

Note sous Cass. 1re civ., 30 novembre 2022, pourvoi n° 21-11.507 :

L’arrêt rendu le 30 novembre 2022 par la première chambre civile suscite la réflexion, tant par ses dits que par ses non-dits, en ce qu’il se prononce sur un mécanisme, la révocation par consentement mutuel d’une donation, dont les contours sont très incertains.

Donation

En l’espèce, une femme avait, par acte authentique, donné une certaine somme d’argent par préciput et hors part à l’un de ses fils en 1994. Le donataire avait ensuite apporté l’essentiel de cette somme au capital d’une société commerciale.

En 2005, également par acte authentique, la donatrice et le donataire ont convenu de révoquer la donation, ce qui a conduit ce dernier à restituer à la première une somme d’argent du même montant que celle qu’il avait reçue en 1994.

À son décès, en 2015, la donatrice a laissé pour lui succéder ses trois enfants. La sœur du donataire a alors agi en nullité de la révocation intervenue en 2005 pour cause illicite, sur le fondement des articles 1131 et 1133 du Code civil dans leur rédaction antérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance du 10 février 2016. Selon elle, la révocation avait pour finalité de faire échec à la réunion fictive à la masse de calcul de la réserve héréditaire de la valeur des titres que le donataire avait acquis avec les fonds donnés. En effet, selon l’article 922 du Code civil, « les biens dont il a été disposé par donation entre vifs sont fictivement réunis à cette masse » et « s’il y a eu subrogation, il est tenu compte de la valeur des nouveaux biens au jour de l’ouverture de la succession ». Or la valeur de ces titres était nettement supérieure au montant nominal de la donation restitué en 2005.

La cour d’appel de Rennes a rejeté la demande. Pour conclure à la validité de l’acte de révocation de la donation intervenu en 2005, elle a estimé que « les mobiles ayant présidé à la révocation litigieuse sont indifférents et ne peuvent se confondre avec la cause de la convention laquelle n’était pas illicite, la révocation conventionnelle d’une donation ne se heurtant à aucune interdiction légale et étant toujours possible sans que les parties n’aient à en justifier les raisons ».

Au visa des anciens articles 1131 et 1133 du Code civil, la Cour de cassation rappelle « qu’un contrat n’est valable que si les motifs ayant déterminé les parties à contracter sont licites ». Elle casse l’arrêt d’appel au motif que les juges du font auraient dû rechercher « si la cause de l’acte révocatoire ne résidait pas dans la volonté des parties de contourner les dispositions d’ordre public de l’article 922 du Code civil ».

Les apports de cet arrêt pourraient largement dépasser ce qui ressort explicitement de son conclusif. D’abord, en reprochant à la cour d’appel de ne pas avoir contrôlé la licéité de la cause subjective de la révocation, la Cour de cassation semble admettre la validité du mécanisme de la révocation par consentement mutuel d’une donation. Ensuite, en jugeant de manière contestable que cette révocation est annulable lorsqu’elle a pour finalité de contourner l’article 922 du Code civil, la Cour semble considérer que la révocation, lorsque sa cause est licite, produit des effets rétroactifs opposables aux tiers fussent-ils héritiers réservataires.

Bien que l’arrêt ait été rendu sous l’empire des dispositions du Code civil antérieures à l’ordonnance du 10 février 2016, ses apports demeurent d’actualité puisque les nouvelles dispositions du Code civil prévoient toujours un contrôle de la licéité du contenu du contrat, qui inclut son but (art. 1128, 3° et 1162), et la disposition de l’ancien article 1134, alinéa 2, relative à la révocation d’un contrat par consentement mutuel a été conservée au nouvel article 1193.

Mon commentaire intégral de cet arrêt peut être consulté au Recueil Dalloz (« Licéité et effets de la révocation conventionnelle d’une donation en présence d’héritiers réservataires », note sous Cass. 1re civ., 30 novembre 2022, D. 2023, p. 215).

Recueil Dalloz 2 février 2023

Parution du « Cours de droit des obligations 2022 »

La quatrième édition du Cours de droit des obligations, que j’ai rédigée avec Garance Cattalano, vient de paraître aux Éditions IEJ de la Sorbonne (nouveau nom des anciennes Éditions IEJ Jean Domat).

Ce manuel s’adresse spécifiquement aux étudiants qui préparent l’examen d’entrée au CRFPA. La matière y est enseignée dans l’optique de la réalisation d’un cas pratique. Le manuel présente ainsi le droit positif de manière synthétique, ce qui permet de balayer un programme très vaste (droit des contrats, responsabilité civile, régime général de l’obligation et droit de la preuve) dans un format relativement contenu, 727 pages. Les débats doctrinaux et les données historiques, qu’il est rarement nécessaire de mobiliser dans le cadre de l’épreuve de droit des obligations de l’examen d’entrée au CRFPA, ne sont évoqués que ponctuellement lorsque cela apparaît indispensable, par exemple lorsque l’interprétation d’une disposition légale ou d’un arrêt est discutée.

Le manuel est agrémenté de nombreux schémas et tableaux pour faciliter la compréhension et le travail de révision.

Couverture manuel Cours de droit des obligations 2022

L’ouvrage est disponible dès maintenant dans la librairie en ligne de l’université et chez les librairies partenaires, comme les librairies LGDJ et Dalloz. Les étudiants qui s’inscrivent à la préparation CRFPA estivale de l’IEJ de Paris 1 recevront par ailleurs un exemplaire de ce manuel, inclus dans leurs frais d’inscription.

Ce manuel s’inscrit dans la collection « CRFPA » des Éditions IEJ de la Sorbonne que j’ai eu le plaisir de diriger cette année encore. Les onze ouvrages de cette collection sont désormais disponibles dans leur quatrième édition :

  • Cours de droit des obligations 2022, 4e éd., C. François et G. Cattalano, 742 pages, ISBN 978-2-38041-031-0
  • Cours de droit administratif 2022, 4e éd., P. Brunet, I. Lamouri, D. Soldini et F. Duffaud, 508 pages, ISBN 978-2-38041-032-7
  • Cours de droit civil 2022, 4e éd., J. Houssier, J. Laurent, F. Masson, M. Saulier et F. Viney, 692 pages, ISBN 978-2-38041-033-4
  • Cours de droit des affaires 2022, 4e éd., R. Dalmau, M. Houssin, F.-X. Lucas et P. Rubellin, 698 pages, ISBN 978-2-38041-034-1
  • Cours de droit fiscal 2022, 2e éd, G. Loustalet et A. Merchadier, 534 pages, ISBN 978-2-38041-041-9
  • Cours de droit international et européen 2022, 4e éd., É. Farnoux, C. Prieto, L. Rass-Masson et S. Robin-Olivier, 510 pages, ISBN 978-2-38041-035-8
  • Cours de droit pénal 2022, 4e éd., N. Jeanne et É. Letouzey, 662 pages, ISBN 978-2-38041-036-5
  • Cours de droit social 2022, 4e éd., A. Fabre, F. Rosa et J. Icard, 822 pages, ISBN 978-2-38041-037-2
  • Cours de procédure administrative contentieuse 2022, 4e éd., P.-O. Caille, 300 pages, ISBN 978-2-38041-038-9
  • Cours de procédure civile et de voies d’exécution 2022, 4e éd., L. Veyre, H. Michelin-Brachet, M. Guez et O. Robin-Sabard, 552 pages, ISBN 978-2-38041-039-6
  • Cours de procédure pénale 2022, 4e éd., N. Jeanne et É. Letouzey, 418 pages, ISBN 978-2-38041-040-2

Parution du « Cours de droit des obligations 2021 »

La troisième édition du Cours de droit des obligations, que j’ai rédigée avec Garance Cattalano, vient de paraître aux Éditions IEJ Jean Domat.

Ce manuel s’adresse spécifiquement aux étudiants qui préparent l’examen d’entrée au CRFPA. La matière y est enseignée dans l’optique de la réalisation d’un cas pratique. Le manuel présente ainsi le droit positif de manière synthétique, ce qui permet de balayer un programme très vaste (droit des contrats, responsabilité civile, régime général de l’obligation et droit de la preuve) dans un format relativement contenu, 713 pages. Les débats doctrinaux et les données historiques, qu’il est rarement nécessaire de mobiliser dans le cadre de l’épreuve de droit des obligations de l’examen d’entrée au CRFPA, ne sont évoqués que ponctuellement lorsque cela apparaît indispensable, par exemple lorsque l’interprétation d’une disposition légale ou d’un arrêt est discutée.

Le manuel est agrémenté de nombreux schémas et tableaux pour faciliter la compréhension et le travail de révision.

Couverture manuel Cours de droit des obligations 2021

L’ouvrage est disponible dès maintenant dans la librairie en ligne de l’université et prochainement dans les librairies partenaires, comme la librairie LGDJ. Les étudiants qui s’inscrivent à la préparation CRFPA estivale de l’IEJ de Paris 1 recevront par ailleurs un exemplaire de ce manuel, inclus dans leurs frais d’inscription.

Ce manuel s’inscrit dans la collection “CRFPA” des Éditions IEJ Jean Domat que j’ai eu le plaisir de diriger cette année encore. Les dix ouvrages de cette collection sont désormais disponibles dans leur troisième édition et sont rejoints par un onzième ouvrage consacré au droit fiscal :

  • Cours de droit des obligations 2021, 3e éd., C. François et G. Cattalano, 727 pages, ISBN 978-2-38041-020-4
  • Cours de droit administratif 2021, 3e éd., P. Brunet, I. Lamouri, D. Soldini et F. Duffaud, 485 pages, ISBN 978-2-38041-021-1
  • Cours de droit civil 2021, 3e éd., J. Houssier, J. Laurent, F. Masson, M. Saulier et F. Viney, 667 pages, ISBN 978-2-38041-022-8
  • Cours de droit des affaires 2021, 3e éd., R. Dalmau, M. Houssin, F.-X. Lucas et P. Rubellin, 681 pages, ISBN 978-2-38041-023-5
  • Cours de droit fiscal 2021, 1re éd, G. Loustalet et A. Merchadier, 513 pages, ISBN 978-2-38041-030-3
  • Cours de droit international et européen 2021, 3e éd., É. Farnoux, C. Prieto, L. Rass-Masson et S. Robin-Olivier, 509 pages, ISBN 978-2-38041-024-2
  • Cours de droit pénal 2021, 3e éd., N. Jeanne et É. Letouzey, 631 pages, ISBN 978-2-38041-025-9
  • Cours de droit social 2021, 3e éd., A. Fabre, F. Rosa et J. Icard, 781 pages, ISBN 978-2-38041-026-6
  • Cours de procédure administrative contentieuse 2021, 3e éd., P.-O. Caille, 261 pages, ISBN 978-2-38041-027-3
  • Cours de procédure civile et de voies d’exécution 2021, 3e éd., L. Veyre, H. Michelin-Brachet, M. Guez et O. Robin-Sabard, 531 pages, ISBN 978-2-38041-028-0
  • Cours de procédure pénale 2021, 3e éd., N. Jeanne et É. Letouzey, 405 pages, ISBN 978-2-38041-029-7

Le manadier, lors d’un lâcher de taureaux qu’il supervise, n’est ni commettant des cavaliers ni gardien de leurs chevaux

Note sous Cass. 2e civ., 16 juill. 2020, pourvoi n° 19-14.678 :

Lorsque les pouvoirs d’usage, de contrôle et de direction d’une chose sont répartis entre deux personnes, le caractère en principe unitaire de la garde impose de désigner un gardien unique. La Cour de cassation, par un arrêt du 16 juillet 2020, juge que les pouvoirs d’usage et de contrôle conservés par le propriétaire de la chose l’emportent sur le pouvoir de direction exercé par celui qui, sans avoir la qualité de commettant, possède néanmoins un pouvoir d’instruction sur le propriétaire.

Mise à jour du 07/12/2021 : Retrouvez ci-dessous mon commentaire de cet arrêt, publié à La Semaine juridique édition Générale du 16 novembre 2020 (JCP G 2020, 1282) il y a plus d’un an et désormais disponible en libre accès sur mon site sur le fondement de l’article L. 533-4, I, du Code de la recherche.

Manadier

Les questions de frontières sont souvent celles qui causent le plus de difficultés au juriste, ainsi que l’illustre l’affaire ici étudiée.

Une association a organisé en 2012 une manifestation, supervisée par un manadier (éleveur de taureaux), consistant en un lâcher de taureaux encadrés par des cavaliers. L’un des chevaux, monté par son propriétaire, s’est emballé et a blessé un spectateur.

La cour d’appel de Nîmes, par un arrêt du 17 janvier 2019, a condamné in solidum l’association, son assureur et le manadier à réparer les préjudices subis par la victime. La condamnation du manadier a été fondée sur la responsabilité du fait des animaux au motif que le cavalier « agissait en qualité de gardian [nom donné aux gardiens de chevaux camarguais] sous les ordres et directives du manadier, lequel bénéficiait, de ce fait, d’un transfert de garde de l’animal impliquant une responsabilité de plein droit, sur le fondement de l’article 1385 [devenu l’article 1243] du code civil, pour les dommages occasionnés par le cheval ».

Le manadier, soutenant que la garde du cheval ne lui avait pas été transférée par son propriétaire, a formé un pourvoi. L’arrêt est cassé : « qu’en statuant ainsi, alors que le seul pouvoir d’instruction du manadier, dont elle constatait qu’il n’avait pas la qualité de commettant, ne permettait pas de caractériser un transfert de garde et qu’il résultait de ses propres constatations que M. Z…, propriétaire du cheval, en était également le cavalier, ce dont il résultait qu’il avait conservé au moins les pouvoirs d’usage et de contrôle de l’animal, dont la garde ne pouvait pas avoir été transférée, de ce fait, la cour d’appel a violé le texte susvisé [l’ancien article 1385 du code civil] ».

La réponse de la Cour de cassation est coiffée par un attendu de principe – ou plutôt, devrait-on dire, par un « paragraphe de principe », l’arrêt étant rédigé en style direct – qui n’est pas nouveau (V. par ex. Cass. 2e civ., 4 oct. 1962, Bull. civ. II, n° 628) et qui rappelle les trois pouvoirs qui caractérisent classiquement la garde d’une chose ou d’un animal : « La responsabilité édictée par [l’ancien article 1385 du code civil] à l’encontre du propriétaire d’un animal ou de celui qui s’en sert est fondée sur l’obligation de garde corrélative aux pouvoirs de direction, de contrôle et d’usage qui la caractérisent. » On rappellera à cet égard que les régimes de responsabilité du fait des animaux (art. 1243) et de responsabilité générale du fait des choses (art. 1242, al. 1er) sont identiques, le second ayant été construit par la jurisprudence en prenant pour modèle le premier (M. Bacache-Gibeili, Les obligations, La responsabilité civile extracontractuelle, 3e éd., Economica, 2016, n° 239).

Selon une jurisprudence constante rappelée par la cour d’appel, le propriétaire d’une chose ou d’un animal en est présumé gardien (Cass. req., 12 janv. 1927, DP 1927, I, p. 145, note R. Savatier). Le pouvoir d’instruction du manadier envers le cavalier est jugé insuffisant, en l’absence de lien de préposition, pour emporter un transfert de la garde du cheval entre son propriétaire et le manadier (I). La Cour de cassation ajoute que le cavalier, parce qu’il conservait « au moins » les pouvoirs d’usage et de contrôle de l’animal, en demeurait gardien, quand bien même le pouvoir de direction aurait-il été transféré au manadier (II).

I. Le transfert de la garde exclu du fait de l’absence de lien de préposition

Si le principe d’incompatibilité des qualités de préposé et de gardien, que la Cour de cassation refuse d’étendre, est classique (A), l’exclusion de tout lien de préposition entre le manadier et le gardien apparaît en revanche surprenante (B).

A. Le refus d’étendre le principe d’incompatibilité des qualités de gardien et de préposé

La Cour de cassation juge de longue date que sont incompatibles les qualités de préposé et de gardien d’une chose (Cass. civ., 27 avr. 1929, DP 1929, 1, p. 129, note G. Ripert ; Cass. 2e civ., 1er avr. 1998, n° 96-17.903) ou d’un animal (Rep. civ. Dalloz, v° « Responsabilité du fait des animaux » par J. Julien, oct. 2018, n° 22). La portée de ce principe est large. D’une part, lorsque la chose manipulée par le préposé appartient au commettant, le lien de préposition fait obstacle au transfert de la garde. D’autre part, lorsque la chose manipulée par le préposé n’appartient pas au commettant, mais à un tiers (Cass. crim., 27 mai 2014, n° 13-80.849) ou au préposé lui-même (Cass. 3e civ., 24 janv. 1973, n° 71-12.861), la garde en est automatiquement transférée au commettant.

Dans l’affaire ici commentée, la Cour de cassation confirme implicitement, à travers une incise, que la garde du cheval aurait été transférée au manadier si celui-ci avait été le commettant du cavalier, puisqu’elle indique que « le seul pouvoir d’instruction du manadier, dont elle constatait qu’il n’avait pas la qualité de commettant, ne permettait pas de caractériser un transfert de garde ».

Selon une première explication, la raison de cette incompatibilité « se trouve dans le fait que le préposé ne disposerait pas de l’intégralité des pouvoirs caractérisant la garde, n’ayant en particulier pas de pouvoir de direction sur la chose (cette direction demeurant au commettant) : en effet, il utilise la chose conformément aux ordres et instructions qu’il a reçus » (J. Julien, op. cit., n° 21). Cette explication est fragilisée par le présent arrêt qui, nous le verrons, affirme que le transfert du seul pouvoir de direction ne suffit pas à entraîner un transfert de la garde.

Selon nous, le commettant exerce les pouvoirs d’usage, de contrôle et de direction de la chose par le truchement de son préposé, concrètement par le biais des ordres qu’il lui donne. C’est donc un pouvoir de garde complet, mais médiat qu’exerce le commettant sur la chose, par l’intermédiaire de son préposé. Si le commettant peut donner des ordres au préposé quant à la direction de la chose, il peut tout autant lui donner des ordres quant à la façon de l’utiliser et de la contrôler.

L’incompatibilité des qualités de préposé et de gardien peut ainsi conduire à retenir une conception juridique de la notion de garde qui est pourtant généralement conçue comme une notion matérielle (M.-A. Péano, « L’incompatibilité entre les qualités de gardien et de préposé », D. 1991, p. 51).

Par cet arrêt, la Cour de cassation fait par ailleurs une interprétation stricte du domaine d’application du principe d’incompatibilité des qualités de gardien et de préposé en refusant de l’étendre, par analogie, à des hypothèses connexes. Elle juge en effet que le « seul pouvoir d’instruction du manadier […] ne permettait pas de caractériser un transfert de garde ». Seule la caractérisation d’un lien de préposition au sens juridique strict est de nature à exclure la qualité de gardien du subordonné.

Il est tentant de transposer cette solution à la responsabilité du fait d’autrui des associations sportives fondée sur l’article 1242, alinéa 1er, du code civil. Bien que ces associations disposent d’une forme de pouvoir d’instruction sur leurs membres lors des manifestations sportives, les arrêts fondateurs de 1995 reposent sur un refus d’assimiler ce pouvoir d’instruction à un lien de préposition (Cass. 2e civ., 22 mai 1995, nos 92-21.197 et 92-21.871, JCP G 1995, II, 22550, note C. Mouly ; RCA 1995, chron. 36, note H. Groutel ; RTD civ. 1995, p. 899, obs. P. Jourdain). Il est donc possible de considérer que les qualités de gardien d’une chose et de membre d’une association sportive ne sont pas incompatibles, de sorte qu’il n’y a pas de transfert au profit de l’association de la garde des choses utilisées par ses membres : ballons, raquettes, etc.

La caractérisation d’un lien de préposition est donc déterminante. La Cour de cassation entretient pourtant la confusion quant aux critères de qualification.

B. L’exclusion d’un lien de préposition occasionnel entre le manadier et le cavalier

La cour d’appel de Nîmes a considéré que le manadier n’était pas le commettant du gardian. Cette conclusion apparaît pourtant incompatible avec ses prémisses : il revenait « au manadier d’établir le parcours de l’abrivado, de sélectionner […] les cavaliers, de leur assigner la place qui convient dans l’escorte » et le gardian agissait « sous les ordres et directives du manadier ». La Cour de cassation fait quant à elle référence au « pouvoir d’instruction » du manadier. Ces éléments correspondent en tout point au rapport d’autorité qui caractérise classiquement le lien de préposition (A. Bénabent, Droit des obligations, 18e éd., LGDJ, 2019, n° 570).

Selon une formule que l’on retrouve dans plusieurs arrêts, « le lien de subordination […] suppose essentiellement que [les commettants] ont le droit de faire acte d’autorité en donnant à leurs préposes des ordres ou des instructions sur la manière de remplir, à titre temporaire ou permanent, avec ou sans rémunération, fût-ce en l’absence de tout louage de services, les emplois qui leur ont été confiés pour un temps et un objet déterminés » (Cass. crim., 7 nov. 1968, n° 68-90.118). Le lien de préposition peut ainsi être occasionnel et exister malgré l’absence de tout contrat entre le commettant et le préposé (L. Leveneur, « Le lien de préposition », Resp. civ. et assur. 2013, dossier 12, spéc. n° 55). Existe alors une « autorité de fait […] souvent limitée à une opération éphémère » (A. Bénabent, op. cit., n° 572), comme cela semblait être le cas en l’espèce.

Plutôt que de prendre acte de l’exclusion d’un lien de préposition effectuée par la cour d’appel, la Haute juridiction aurait pu opérer une substitution de motif qui aurait permis de revenir à une solution plus orthodoxe techniquement tout en sauvant l’arrêt de la cassation (CPC, art. 620, al. 1er ; J. Boré et L. Boré, La cassation en matière civile, 6e éd., Dalloz, 2015, n° 83.81). En effet, ainsi que nous l’avons vu, la garde des choses utilisées par un préposé est automatiquement transférée à son commettant. La caractérisation d’un lien de préposition entre le manadier et le gardian aurait donc pu fonder le transfert de la garde du cheval retenu par la cour d’appel.

Peut-être faut-il voir dans cet arrêt la mise en œuvre du critère de l’activité pour le compte et dans l’intérêt d’autrui qui, selon certains auteurs, concurrencerait dans la jurisprudence le critère de l’autorité pour caractériser le lien de préposition (G. Viney, P. Jourdain et S. Carval, Traité de droit civil, Les conditions de la responsabilité, 4e éd., LGDJ, 2013, n° 792). Ce serait parce que le préposé agit « pour le compte » du commettant que ce dernier devrait « in fine assumer les risques de son entreprise », d’autant plus qu’il « peut s’assurer en conséquence » (M. Bacache-Gibeili, op. cit., n° 259). En l’espèce, le gardian n’agissait pas pour le compte et dans l’intérêt du manadier puisque ce n’est pas celui-ci qui avait organisé la manifestation taurine, mais une association.

La doctrine dénonce de longue date l’absence de conception jurisprudentielle claire du lien de préposition (L. Leveneur, op. cit. ; N. Dejean de la Bâtie, Droit civil français, t. VI-2, Responsabilité délictuelle, 8e éd., Librairies Techniques, 1989, n° 103). Le présent arrêt entretient malheureusement la confusion.

Une fois actés l’exclusion du lien de préposition et le refus de déduire un transfert de la garde de la seule existence d’un pouvoir d’instruction, il ne restait qu’une échappatoire pour le cavalier : démontrer un transfert matériel des pouvoirs qui caractérisent la garde. Cette éventualité est également balayée par la Cour de cassation.

II. Le transfert de la garde exclu du fait du maintien des pouvoirs d’usage et de contrôle

L’arrêt nous enseigne que le seul transfert du pouvoir de direction est insuffisant pour établir un transfert de la garde de la chose (A). Cette décomposition de la notion de garde, que l’arrêt tente de mettre en œuvre, apparaît difficilement praticable (B).

A. L’insuffisance du pouvoir de direction pour caractériser la garde

La Cour de cassation décompose son raisonnement en deux temps.

D’abord, c’est parce que le propriétaire du cheval en était également le cavalier que celui-ci avait conservé « au moins » les pouvoirs d’usage et de contrôle de l’animal. L’usage est, au sens commun du terme, « le fait de se servir de quelque chose » (Trésor de la langue française informatisé, v° « Usage ») et le contrôle correspondrait « à l’idée que le gardien a le pouvoir d’éviter que la chose cause un dommage » (Rép. civ. Dalloz, v° « Responsabilité du fait des choses inanimées » par L. Grynbaum, juin 2011, n° 175). Le cavalier est par définition celui qui se sert du cheval et il est le mieux placé, en principe, pour éviter que celui-ci cause un dommage.

Ensuite, c’est parce que le cavalier « avait conservé au moins les pouvoirs d’usage et de contrôle de l’animal » que la garde ne pouvait avoir été transférée.

La solution apparaît cohérente, de prime abord, avec le refus d’étendre le principe d’incompatibilité des qualités de gardien et de préposé à des hypothèses connexes dans lesquelles il n’y a pas de lien de préposition. En effet, la direction « représente le pouvoir de guider la chose » (L. Grynbaum, op. cit.). Si le propriétaire du cheval avait perdu son pouvoir de direction, c’était en raison du pouvoir d’instruction qu’exerçait le manadier puisqu’il revenait à ce dernier « d’établir le parcours de l’abrivado » et d’assigner aux chevaux et cavaliers « la place qui convient dans l’escorte ». Or, la Cour de cassation ayant affirmé que ce seul pouvoir d’instruction ne permettait pas de caractériser un transfert de la garde, il eût été contradictoire de déduire un tel transfert du seul constat du transfert du pouvoir de direction.

La solution peut paraître discutable si l’on considère que c’est le pouvoir de direction du commettant qui justifie l’incompatibilité des qualités de gardien et de préposé (B. Waltz-Teracol, D. 2020, p. 1704). Elle apparaît moins discutable si l’on considère, comme nous l’avons fait, que cette incompatibilité se justifie par le pouvoir du commettant de donner des ordres au préposé non seulement quant à la direction de la chose, mais aussi quant à la façon d’utiliser et de contrôler celle-ci. Le préposé n’est en réalité indépendant dans l’exercice d’aucun des trois pouvoirs qui caractérisent la garde, de sorte qu’il y a lieu de considérer que le réel détenteur de ces pouvoirs est, en dernière analyse, le commettant qui les exerce par le truchement des ordres qu’il donne à son préposé.

B. L’illusoire décomposition de la notion de garde

En dehors de tout rapport de préposition caractérisé par les juges, il arrive qu’une personne soit qualifiée de gardienne alors même que le pouvoir d’usage de la chose était exercé par un tiers. Il en va ainsi de la personne qui invite un tiers à cueillir des cerises dans son jardin et qui lui prête à cette fin son échelle tout en demeurant à proximité de celle-ci. La Cour de cassation juge que le propriétaire de l’échelle en « conserv[e] les pouvoirs de direction et de contrôle » de sorte qu’elle en « rest[e] gardienne » (Cass. 2e civ., 11 févr. 1999, n° 97-15.615 ; RTD civ. 1999, p. 630, obs. P. Jourdain).

Plusieurs arrêts, même s’ils ne sont pas aussi explicites, semblent pouvoir être rattachés à cette idée (Cass. 2e civ., 19 juin 2003, n° 01-17.575 ; 7 mai 2002, n° 00-14.594, D. 2003, somm. 463, obs. P. Jourdain ; Dr. et patr. 12/2002, p. 80, obs. F. Chabas ; 2 févr. 1966, Gaz. Pal. 1966, 1, 310).

Peut-on en déduire qu’en cas de division des trois pouvoirs qui caractérisent la garde, la qualité de gardien est systématiquement reconnue à celui qui exerce conjointement soit les pouvoirs d’usage et de contrôle, soit les pouvoirs de direction et de contrôle, mais jamais à celui qui exerce le seul pouvoir de direction ? Ces distinctions permettraient de donner à la jurisprudence relative au transfert de la garde les apparences d’un jardin à la française, ce qu’elle n’est malheureusement pas. En effet, les notions de direction, de contrôle et d’usage demeurent bien nébuleuses. La jurisprudence ne s’est jamais risquée à les définir ; la doctrine guère plus.

Aucune tentative de distinction ne semble résister à l’analyse, a fortiori lorsque l’on ajoute à l’équation la question du lien de préposition.

En l’espèce, si le cavalier a conservé les pouvoirs d’usage et de contrôle de l’animal, on conçoit difficilement comment il pourrait avoir transféré le pouvoir de direction : il en garde nécessairement au moins une partie. Les instructions du manadier quant à la direction du cheval sont très générales et c’est le cavalier qui continue de guider précisément ce dernier.

Quant aux arrêts qui jugent que le propriétaire avait conservé les pouvoirs de contrôle et de direction de la chose tout en transférant son usage, c’est pourtant celui qui utilise matériellement la chose qui semble le mieux à même de la diriger et de la contrôler. Si le propriétaire conserve juridiquement les pouvoirs de direction et de contrôle, c’est parce qu’il peut donner des instructions à celui qui utilise la chose. Mais dans ce cas, le propriétaire n’a-t-il pas également le pouvoir de donner des instructions quant à la façon d’utiliser la chose ? Le propriétaire devrait selon nous être qualifié de commettant dans ces hypothèses, ce que la Cour de cassation n’a pas hésité à faire dans des espèces proches (G. Viney, P. Jourdain et S. Carval, op. cit., n° 796).

Ce flou qui entoure la notion de garde n’est pas près de s’estomper, car il sied aux magistrats. Plus les critères sont vagues, plus ils laissent la place à une certaine casuistique motivée par des considérations d’opportunité. Le législateur semble pour l’instant s’en satisfaire puisque ni le projet de réforme de la responsabilité civile de la Chancellerie de mars 2017 (art. 1243, al. 4) ni la récente proposition de loi du Sénat de juillet 2020 (art. 1242, al. 4) ne définissent les notions d’usage, de contrôle et de direction qu’ils proposent pourtant de consacrer dans la loi.

De l’appréciation de la perte de chance consécutive à un défaut d’information sur l’adéquation d’un contrat d’assurance groupe à la situation personnelle de l’emprunteur

Obs. sous Cass. 2e civ., 20 mai 2020, pourvoi n° 18-25.440 :

Un particulier a adhéré, pour garantir le remboursement d’un prêt immobilier, au contrat d’assurance groupe souscrit par la banque auprès d’un assureur afin de couvrir les risques décès, invalidité et incapacité. L’emprunteur ayant été victime d’un accident du travail, l’assureur a d’abord pris en charge les échéances du prêt avant de notifier à l’emprunteur son refus du maintien de la garantie en raison d’un taux d’incapacité fonctionnelle ne dépassant pas le minimum prévu par le contrat d’assurance. L’emprunteur assigne alors la banque en réparation de son préjudice découlant d’un manquement de celle-ci à ses devoirs d’information, de conseil et de mise en garde. La cour d’appel considère que le prêteur a effectivement manqué à son devoir de conseil, mais rejette l’action en réparation au motif que l’emprunteur ne démontre pas que, « complètement informé, il aurait contracté une autre assurance qui l’aurait couvert contre l’incapacité de travail qui lui avait été reconnue ». Elle en déduit une absence de préjudice réparable et, plus précisément, l’absence de perte d’une chance de souscrire une assurance garantissant à l’emprunteur le risque d’une incapacité totale de travail. Saisie d’un pourvoi formé par l’emprunteur, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation casse l’arrêt d’appel au visa de l’ancien article 1147 du code civil :

« en statuant ainsi, alors que toute perte de chance ouvre droit à réparation, la cour d’appel, qui a exigé de l’assuré qu’il démontre que s’il avait été parfaitement informé par la banque sur l’adéquation ou non de l’assurance offerte à sa situation, il aurait souscrit, de manière certaine, un contrat mieux adapté, la cour d’appel a violé [l’article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016] »

Mise à jour du 07/12/2021 : Retrouvez ci-dessous mes observations sous cet arrêt, publiées à l’AJ Contrat (AJ contrat 2020, p. 385) il y a plus d’un an et désormais disponible en libre accès sur mon site sur le fondement de l’article L. 533-4, I, du Code de la recherche.

Maison

La violation par la banque de son « devoir de conseil » (expression retenue par la cour d’appel) n’était pas contestée par le pourvoi car, selon un principe posé par l’assemblée plénière et régulièrement rappelé depuis, « le banquier, qui propose à son client auquel il consent un prêt, d’adhérer au contrat d’assurance de groupe qu’il a souscrit à l’effet de garantir, en cas de survenance de divers risques, l’exécution de tout ou partie de ses engagements, est tenu de l’éclairer sur l’adéquation des risques couverts à sa situation personnelle d’emprunteur, la remise de la notice ne suffisant pas à satisfaire à cette obligation » (Cass. ass. plén., 2 mars 2007, n° 06-15.267 ; D. 2007, 985, note S. Piedelièvre; ibid.  863, obs. V. Avena-Robardet ; D. 2008. 127, obs. H. Groutel ; ibid. 880, obs. R. Martin ; JCP  2007, II, 10098, note A. Gourio ; ibid., I, 158, n° 6, obs. Ph. Simler ; JCP E 2007, 1375, note D. Legeais ; RGDA 2007, 397, note J. Kullmann ; RDI 2007, 319, obs. L. Grynbaum ; RDC 2007, 750, obs. G. Viney ; à propos de l’autonomie de l’obligation d’éclairer du banquier par rapport aux obligations d’information, de mise en garde et de conseil, V. P. Pailler, « Précisions sur les obligations d’information du banquier souscripteur d’une assurance de groupe », D. 2016. Chron. 953). Or, en l’espèce, le prêteur s’était contenté de remettre à l’emprunteur une notice d’information.

La nature contractuelle de la responsabilité du prêteur, que l’on déduit du visa de l’arrêt, est également classique. Les obligations précontractuelles d’information (au sens large) du banquier ont été construites et façonnées par la jurisprudence et celle-ci, faute de fondement textuel plus adapté, a rattaché artificiellement ces obligations au contrat. Ce rattachement est critiqué par la doctrine tant on peine à concevoir comment une obligation précontractuelle d’information pourrait trouver sa source dans un contrat qui n’existe pas encore au moment où elle a vocation à être exécutée (B. Fages, Droit des obligations, 6e éd., LGDJ, 2016, n° 99). L’ordonnance du 10 février 2016, qui n’était pas applicable en l’espèce, pourrait faire évoluer la jurisprudence sur ce point. Il semble peu probable que les obligations d’information du banquier d’origine jurisprudentielle soient rattachées au nouvel article 1112-1 du code civil, l’obligation précontractuelle d’information générale qu’il fonde étant trop corsetée. En effet, cette nouvelle obligation légale ne s’impose qu’à « celle des parties qui connaît une information dont l’importance est déterminante pour le consentement de l’autre » (al. 1er), alors que l’obligation du banquier d’éclairer l’emprunteur lui impose de se renseigner sur les besoins de son client pour pouvoir informer celui-ci du caractère adapté ou non de l’assurance proposée (D. Legeais, J.-Cl. Commercial, Fasc. 344, Assurance de groupe, oct. 2016, n° 13). Le banquier ne peut donc pas exciper de son ignorance pour prétendre échapper à son obligation. En revanche, il est possible que la Cour de cassation trouve dans le nouvel article 1104 du code civil un nouveau fondement textuel aux obligations d’information du banquier. Selon cette disposition, les contrats doivent être négociés et formés de bonne foi. Cela permettrait de conférer une nature extracontractuelle plus orthodoxe à la responsabilité du banquier en cas de manquement à ses obligations précontractuelles d’information, même si un tel changement de nature de la responsabilité n’affecterait probablement pas son régime. Philippe le Tourneau relevait en effet, il y a trois décennies de cela, que le droit des responsabilités professionnelles jouit d’une certaine autonomie qui « permet de dépasser les obsolètes oppositions du droit civil et du droit commercial, de la responsabilité délictuelle et de la responsabilité contractuelle » (« Les professionnels ont-ils du cœur ? », D. 1990. Chron. 21).

1. L’existence d’une perte de chance. La faute et la nature de la responsabilité n’étant pas contestées, c’est l’existence de la perte d’une chance, c’est-à-dire de « la disparition actuelle et certaine d’une éventualité favorable » selon la définition jurisprudentielle classique (V. par ex. Civ. 1re, 21 nov. 2006, n° 05-15.674, JCP G 2007, II, 10181, note F. Ferrière ; ibid., I, 115, n° 2, obs. Ph. Stoffel-Munck ; RDC 2007, 266, obs. D. Mazeaud), qui l’était.

Sur ce point, la motivation de la cour d’appel de Lyon paraît surprenante. Celle-ci reprochait à l’emprunteur de ne pas démontrer que, « complètement informé, il aurait contracté une autre assurance qui l’aurait couvert contre l’incapacité de travail qui lui avait été reconnue ». Or, si l’emprunteur était parvenu à apporter cette preuve, ce n’est pas d’une simple perte de chance d’éviter le préjudice dont il aurait pu obtenir réparation (soit d’une fraction de son préjudice), mais de l’intégralité de son préjudice. En effet, s’il est certain que, dûment informé, l’emprunteur aurait contracté une assurance le couvrant contre l’incapacité de travail, alors on n’est plus en présence de la disparition d’une simple « éventualité » favorable. Ce fonctionnement classique de la notion de perte d’une chance a été illustré notamment par la célèbre affaire Perruche. Pour rappel, dans cette espèce, une femme enceinte avait décidé de recourir à une interruption volontaire de grossesse (IVG) en cas d’atteinte rubéolique et elle n’avait pas pu exercer ce choix en raison d’une erreur de diagnostic médical ayant empêché la détection de la maladie. Dès lors qu’il était certain que la mère aurait eu recours à une IVG si elle avait été informée que le fœtus était atteint par la rubéole, son préjudice ne pouvait pas être une simple perte de chance : tous les préjudices découlant du dommage devaient être réparés (Cass. ass. plén., 17 nov. 2000, n° 99-13.701 ; D. 2001, 332, note D. Mazeaud et note P. Jourdain ; ibid. somm. 2796, obs. F. Vasseur-Lambry ; JCP G 2000, II, 10438, rapp. P. Sargos, concl. contraires J. Sainte-Rose, note F. Chabas ; Gaz. Pal. 2001, 37, note J. Guigue ; Dr. fam. 2001, n° 11, note P. Murat ; CCC 2001, n° 39, note L. Leveneur ; RTD civ. 2001, 103, obs. J. Hauser ; ibid. 149, obs. P. Jourdain ; ibid. 226, obs. R. Libchaber). La cour d’appel de Lyon a donc déplacé l’objet de la preuve : alors que l’emprunteur prétendait prouver la perte d’une simple chance, la cour d’appel a exigé qu’il démontre que, dûment informé, il aurait avec certitude contracté une autre assurance.

La cassation est donc logique. Il restera toutefois à l’emprunteur à démontrer devant la cour d’appel de renvoi qu’il a réellement perdu une chance de souscrire à une assurance plus adaptée. Sur ce point, la deuxième chambre civile guide la cour de renvoi en précisant que « toute perte de chance ouvre droit à réparation ». On se souvient en effet que la première chambre civile, après avoir jugé que « la perte certaine d’une chance même faible est indemnisable » (Civ. 1re, 16 janv. 2013, n° 12-14.439 ; D. 2013. 619, obs. I. Gallmeister, note M. Bacache ; JCP  2013, II, 1291, n° 1, obs. Ph. Stoffel-Munck ; RCA 2013, comm. 108, F. Leduc ; Gaz. Pal. 23 avr. 2013, 14, A. Guégan-Lécuyer ; RTD civ. 2013, 380, obs. P. Jourdain), avait paru revenir sur cette solution en exigeant que la chance perdue soit « raisonnable » (Civ. 1re, 30 avr. 2014, deux espèces, n° 13-16.380, AJ fam. 2014, 570, obs. S. Thouret, et n° 12-22.567, RCA 2014. comm. 215, obs. F. Leduc ; JCP  2014, 1381, note J.-S. Borghetti ; D. 2015, 124, obs. Ph. Brun ; Civ. 1re, 25 nov. 2015, n° 14-25.109). La première chambre civile a fini par réaffirmer la solution de 2013 en jugeant que « toute perte de chance ouvre droit à réparation », « même minime » (Civ. 1re, 12 oct. 2016, n° 15-23.230 ; D. 2016, 46, note J. Traullé ; ibid. 24, obs. Ph. Brun ; RDC 2017, 27, note J.-S. Borghetti), ce que la deuxième chambre civile confirme par le présent arrêt. Il faut toutefois garder à l’esprit qu’au-delà de ces principes dont la bonne application est contrôlée par la Cour de cassation, la détermination du quantum de la chance perdue ne peut être qu’abandonnée au pouvoir souverain d’appréciation des juges du fond ;  ces derniers conservent donc, par ce biais, une marge de manœuvre considérable.

2. La preuve de la perte de chance. Comment l’emprunteur peut-il prouver qu’il a perdu une chance, même minime, de souscrire à une assurance plus adaptée ? Il ressort de la jurisprudence que l’emprunteur doit démontrer la réunion de deux critères.

Le premier critère est objectif : l’emprunteur avait-il la possibilité de souscrire à une assurance plus adaptée à sa situation ? Cela implique, d’une part, que l’emprunteur avait les moyens financiers de souscrire à une assurance offrant une meilleure couverture (les primes étant en principe plus élevées) et, d’autre part, qu’il existait sur le marché des assureurs qui, compte tenu de la situation personnelle de l’emprunteur, auraient pu lui proposer une assurance plus complète que l’assurance groupe à laquelle il a souscrit. La jurisprudence est pour le moins instable sur ce point. Ainsi, dans une affaire où un emprunteur reprochait à la banque de ne pas lui avoir conseillé de souscrire à une assurance couvrant le risque de perte totale irréversible d’autonomie et d’incapacité de travail au-delà de 65 ans, la cour d’appel avait conclu à l’absence de perte de chance au motif que l’emprunteur ne démontrait « pas qu’il aurait pu obtenir d’un autre assureur une garantie de ce type au-delà de l’âge de 65 ans, compte tenu du risque important de survenance d’une maladie invalidante à cette période de la vie ». La chambre commerciale a jugé ce motif « impropre à exclure toute probabilité de réalisation de la perte de chance invoquée » (Com. 13 janv. 2015, n° 13-24.026, inédit). Quelques mois plus tard, dans une espèce très similaire où une cour d’appel avait adopté une motivation quasiment identique, la chambre commerciale rejette cette fois le pourvoi (Com. 1er déc. 2015, n° 14-22.134). Dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt ici commenté, l’emprunteur reprochait à la banque de ne pas l’avoir informé de la méthode de calcul de l’incapacité de travail prévue par le contrat d’assurance, qui ne se basait pas sur la seule notion d’incapacité de travail reconnue par la sécurité sociale, mais qui pondérait ce critère de l’incapacité professionnelle par un critère d’incapacité fonctionnelle. La cour d’appel de Lyon a retenu que « les assurances ne couvrent pas l’incapacité de travail dans les termes de l’incapacité reconnue par la sécurité sociale ». Autrement dit, il n’y aurait pas d’alternative à cette méthode de calcul sur le marché des assurances. Il est pourtant douteux que cette constatation suffise à écarter l’existence d’une perte de chance dans la mesure où l’emprunteur peut toujours souscrire à une assurance qui couvre le risque d’un taux d’incapacité fonctionnelle plus faible.

Le second critère est subjectif : s’il existait sur le marché une assurance plus adaptée à la situation de l’emprunteur et que celui-ci avait les moyens d’y souscrire, l’emprunteur doit encore démontrer qu’il aurait pu avoir la volonté de souscrire à cette autre assurance s’il avait été dûment informé de l’inadéquation du contrat d’assurance groupe à sa situation. En effet, plus les risques couverts par l’assurance sont importants, plus les primes sont élevées et si l’emprunteur, par exemple, avait fait savoir qu’il ne souhaitait pas payer des primes supérieures à un certain montant, cela pourrait être de nature à exclure toute perte de chance. Il a ainsi pu être jugé, dans une autre affaire, qu’il revient aux emprunteurs de rapporter la preuve que, « dûment informés, ils auraient eu la volonté et les moyens de souscrire une assurance plus complète, nécessairement plus coûteuse, alors même qu’ils n’ont pas entendu s’assurer contre le risque de chômage » (Civ. 1re, 29 juin 2016, n° 15-17.502, inédit ; RD bancaire et fin. 2016, comm. 201, obs. J. Djoudi). L’analogie avec l’affaire Perruche est, ici encore, possible. La mère avait légalement la possibilité de faire pratiquer une IVG, mais si elle avait déclaré, pendant sa grossesse, être contre toute IVG par principe, alors elle n’aurait pas pu se prévaloir d’une perte de chance de faire pratiquer une IVG en raison des fautes commises par les professionnels de santé.

Pour illustrer la mise en œuvre de ces deux critères, on peut renvoyer par exemple à un arrêt de la chambre commerciale du 10 mars 2015 (n° 14-10.712, inédit) : l’existence d’une perte de chance y a été exclue, car les emprunteurs n’avaient pas démontré « qu’un autre assureur aurait accepté de garantir le risque lié à [la] pathologie au regard des antécédents avérés, graves et répétés [critère objectif] et que, s’ils avaient trouvé un assureur consentant à les garantir, ils auraient accepté le surcoût nécessairement appliqué par cette autre compagnie [critère subjectif] ».

À retenir : Lorsque la banque manque à son obligation d’éclairer l’emprunteur sur l’adéquation des risques couverts par l’assurance groupe à sa situation personnelle, l’emprunteur ne doit pas prouver qu’il aurait souscrit, de manière certaine, un contrat mieux adapté s’il avait été parfaitement informé. Celui-ci doit simplement établir qu’il a perdu une éventualité favorable, c’est-à-dire qu’il aurait pu, s’il avait été dûment informé, souscrire une assurance plus adaptée. La deuxième chambre civile confirme par ailleurs que « toute perte de chance ouvre droit à réparation », même minime.


Thèse « L’acte juridique irrégulier efficace, Contribution à la théorie de l’acte juridique »

Ma thèse vient de paraître dans la collection « Bibliothèque de droit privé » de l’éditeur LGDJ. Celle-ci est disponible dès maintenant sur Internet et en librairie ; elle peut également être consultée dans certaines bibliothèques universitaires.

Thèse L'acte juridique irrégulier efficace - Clément François

La thèse, dirigée par le professeur Thierry Revet, a été soutenue à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, le 28 novembre 2017, devant un jury composé des professeurs Gaël Chantepie, Daniel Mainguy, Judith Rochfeld, Thierry Revet et Yves-Marie Serinet, que je remercie de nouveau. Elle a été actualisée à l’occasion de sa publication.

Résumé de la thèse : Les actes juridiques sont définis par la loi comme des manifestations de volonté destinées à produire des effets de droit. Certaines de ces manifestations de volonté sont contraires à une règle qui s’imposait à leurs auteurs et produisent néanmoins tout ou partie de leurs effets de droit. Font partie de cette catégorie, notamment : la rétractation d’une offre de contracter par le pollicitant avant le délai prévu ; le contrat conclu sans pouvoir par un mandataire apparent ; les actes de procédure entachés d’une irrégularité de forme, mais qui ne causent aucun grief ; les actes affectés d’une cause d’invalidité pour lesquels l’action en nullité et l’exception de nullité sont définitivement neutralisées ; les actes irréguliers sanctionnés par une nullité partielle ou non rétroactive, comme le contrat de société ou le mariage putatif, etc. La présente étude propose de saisir ces phénomènes de façon unitaire par un nouveau concept : l’acte juridique irrégulier efficace.

L’objet étudié met en lumière certaines insuffisances de la théorie civiliste de l’acte juridique, qui peut être utilement précisée à l’aide de la théorie normativiste du droit. En recourant à un autre concept, celui de norme habilitante, une théorie de l’efficacité et du contrôle de régularité des actes juridiques est ainsi proposée. Les motifs politiques pour lesquels certains actes irréguliers ne sont pas sanctionnés par l’inefficacité et les sanctions alternatives du droit positif sont ensuite analysés. Enfin, le pouvoir de décider d’écarter la sanction de l’inefficacité et les techniques juridiques par lesquelles il s’exerce formellement sont étudiés à la lumière de la théorie réaliste de l’interprétation et de la théorie des contraintes juridiques.

Références : Clément François, L’acte juridique irrégulier efficace, Contribution à la théorie de l’acte juridique, préf. Thierry Revet, LGDJ, coll. Bibliothèque de droit privé, t. 598, ISBN 978-2-275-07608-8, 590 pages.

Prix de thèse de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, prix de thèse de la Revue des contrats, prix Ripert de la Chancellerie des universités de Paris.

Parution du « Cours de droit des obligations 2020 »

La deuxième édition du Cours de droit des obligations, que j’ai rédigée avec Garance Cattalano, vient de paraître aux Éditions IEJ Jean Domat.

Ce manuel s’adresse spécifiquement aux étudiants qui préparent l’examen d’entrée au CRFPA. La matière y est enseignée dans l’optique de la réalisation d’un cas pratique. Le manuel présente ainsi le droit positif de manière synthétique, ce qui permet de balayer un programme très vaste (droit des contrats, responsabilité civile, régime général de l’obligation et droit de la preuve) dans un format relativement contenu, 707 pages. Les débats doctrinaux et les données historiques, qu’il est rarement nécessaire de mobiliser dans le cadre de l’épreuve de droit des obligations de l’examen d’entrée au CRFPA, ne sont évoqués que ponctuellement lorsque cela apparaît indispensable, par exemple lorsque l’interprétation d’une disposition légale ou d’un arrêt est discutée.

Le manuel est agrémenté de nombreux schémas et tableaux pour faciliter la compréhension et le travail de révision.

Cours de droit des obligations 2020 CRFPA couverture

L’ouvrage est disponible dès maintenant dans la librairie en ligne de l’université et dans les librairies partenaires. Les étudiants qui s’inscrivent à la préparation CRFPA estivale de l’IEJ de Paris 1 recevront par ailleurs un exemplaire de ce manuel, inclus dans leurs frais d’inscription.

Ce manuel s’inscrit dans la collection « CRFPA » des Éditions IEJ Jean Domat que j’ai eu le plaisir de diriger cette année encore. Les dix ouvrages de cette collection sont désormais disponibles dans leur deuxième édition :

  • C. François et G. Cattalano, Cours de droit des obligations 2020, 707 pages, ISBN 978-2-38041-010-5
  • P. Brunet, I. Lamouri et D. Soldini, Cours de droit administratif 2020, 403 pages, ISBN 978-2-38041-011-2
  • J. Houssier, J. Laurent, F. Masson, M. Saulier et F. Viney, Cours de droit civil 2020, 689 pages, ISBN 978-2-38041-012-9
  • R. Dalmau, M. Houssin, F.-X. Lucas et P. Rubellin, Cours de droit des affaires 2020, 675 pages, ISBN 978-2-38041-013-6
  • É. Farnoux, C. Prieto, L. Rass-Masson et S. Robin-Olivier, Cours de droit international et européen 2020, 477 pages, ISBN 978-2-38041-014-3
  • N. Jeanne, É. Letouzey et P.-J. Delage, Cours de droit pénal 2020, 635 pages, ISBN 978-2-38041-015-0
  • A. Fabre, F. Rosa et J. Icard, Cours de droit social 2020, 703 pages, ISBN 978-2-38041-016-7
  • P.-O. Caille, Cours de procédure administrative contentieuse 2020, 215 pages, ISBN 978-2-38041-017-4
  • L. Veyre, H. Michelin-Brachet, M. Guez et O. Sabard, Cours de procédure civile 2020, 507 pages, ISBN 978-2-38041-018-1
  • N. Jeanne, É. Letouzey et P.-J. Delage, Cours de procédure pénale 2020, 375 pages, ISBN 978-2-38041-019-8